Manifestation anti-junte en Guinée: du deux poids deux mesures de Bachir Diallo?

Les habitants de la commune urbaine de Kaloum, centre administratif de Conakry restés jusqu’ici sourd à l’appel à manifester lancé par les forces vives ces dernières années, ont haussé le ton hier jeudi 1er février 2024. 

Ce mouvement de contestation porté par les femmes a commencé  hier jeudi vers 5h00 du matin. Ces femmes ont donc bloqué  les accès au centre ville de la capitale Conakry. 

L’entrée du siège des affaires politiques et économiques, située sur la presqu’île de Kaloum, est restée donc fermée hier. 

Pourquoi cette contestation des femmes de Kaloum ? 

Ce mouvement parti du quartier Coronthie situé à Kaloum, dont les habitants ont été très touchés par l’incendie du plus grand dépôt du pays, réclamait initialement l’aide qui leur a été promise après le drame pour réparer leurs maisons.

Certaines parmi les femmes qui ont manifesté hier se disent être étonnées de ne pas voir se matérialiser l’afflux de dons dont l’explosion a suscité non seulement en Guinée mais au-delà. 

Sur cette liste des revendications s’ajoutent aussi l’augmentation du prix des denrées de première nécessité à quelques semaines du mois de ramadan (riz, huile, sucre),  la répression de l’opposition et les restrictions imposées à internet. 

On pouvait lire sur les pancartes brandies par les femmes « Arrêtez les tueries. Arrêtez le sale boulot, ça suffit comme ça. La Guinée souffre, libérez internet ». 

Et d’autres femmes scandaient en langue soussou « nous sommes fatiguées de vos mensonges ». 

Les forces de sécurité ont finalement dispersé les manifestants et libéré le passage sans incidents majeurs. 

Il faut noter que l’accès à internet, aux réseaux sociaux reste depuis des mois restreint par la junte militaire guinéenne. 

Les putschistes ont engagé une guerre sans merci contre les médias privés guinéens et c’est pourquoi le journaliste et syndicaliste des médias Sékou Jamal Pendessa est emprisonné depuis des jours à la maison d’arrêt de Coronthie. 

La répression du régime militaire guinéen contre le peuple, les journalistes, les opposants n’a plus de limites. 

Une contestation sans victime, pourtant rare en Guinée 

Ces rares protestations non autorisées sous le régime militaire venu au pouvoir par la force en septembre 2021, n’a pas fait de victime hier à Kaloum. 

La junte conduite par le général Mamadi Doumbouya a interdit depuis 2022 toute forme de manifestations dans le pays. 

Et il faut signaler que chaque fois que des manifestations ont été organisées dans les fiefs de l’opposition notamment sur l’axe, la milice du ministre de l’intérieur et de la protection civile Bachir Diallo et celle de Balla Samoura, membre du CNRD les ont réprimé de façon sanglante. 

Depuis 2021, la junte a fait arrêter un certain nombre de dirigeants de l’opposition, des membres de la société civile et de la presse, et a lancé des poursuites contre d’autres. 

Elle a assassiné depuis 2021 au total 23 jeunes adolescents dans la commune de Ratoma sans que les auteurs ne soient inquiétés ou traduits en justice. 

Pourtant les habitants de Ratoma n’ont fait aussi qu’ exercer leur droit de manifester qui ne doit pas être soumis à une autorisation préalable, puisque selon le droit international, il a un caractère d’inviolabilité et universalité. Et devoir d’ailleurs demander une autorisation pour manifester ses opinions a un effet dissuasif trop fort.

Sauf que les 23 jeunes tombés sous les cribles des balles de la milice de Bachir Diallo n’ont pas eu la chance d’être protégés par l’État guinéen, comme ce fut le cas hier à Kaloum. 

Du deux poids deux mesures de la junte militaire guinéenne

On constate donc que la junte militaire guinéenne a bien les moyens, la possibilité d’encadrer  de protéger les manifestations, et éviter des débordements ou encore des tueries insensées. 

La milice de Bachir Diallo prouve par là que l’usage de force pendant une manifestation, n’est ni nécessaire, ni légal. 

Ceci dit, les agissements excessifs vis-à-vis des habitants de l’axe sont bien voulus et entretenus par les forces de l’ordre qui  provoquent cet état de fait afin de semer le chaos et de surtout exceller dans la stigmatisation d’une grande partie de la population guinéenne.

Car leurs agissements d’hier vis-à -vis de la population de Kaloum prouvent qu’ils savent que l’usage de force pendant les manifestations ne doit être nécessaire qu’en dernier recours et ne doit en aucun cas conduire à des tueries. 

Il doit surtout se limiter au maximum aux personnes qui commettent des violences.

S’il n’est pas possible de les cibler, et que des personnes pacifiques risquent d’être touchées par un accident, la police et la gendarmerie doivent faire usage de certaines armes.

Mais lorsqu’il s’agit de la commune urbaine de Ratoma, réputée fief de l’opposition, L’état guinéen, notamment la junte militaire n’en a jamais tenu compte et ne le fera jamais.

Aïssatou Chérif Baldé 

Un commentaire

  1. Après que les manifestants ont eut quelques sacs de riz comme d’habitude (Au temps de Alfa Con-dé), la manifestation a pris fin, comme par magie.

    Drôle de revendication patriotique.
    Chère madame Aissatou shérif.

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