Nous savons que depuis l’avènement du multipartisme en Guinée, les partis créés ne se sont pas réellement engagés dans la compétition politique comme représentant d’intérêts sociaux.
À travers leurs agissements on voit bien qu’ils se comportent plutôt comme porteurs « d’ambitions personnelles ou de coalitions d’intérêts privés plus ou moins sordides » visant à « être associés au partage du gâteau qu’implique la participation au pouvoir ».
De Lansana Conté à nos jours, tous les partis politiques grands ou petits ont du mal à se démarquer de cette vision politique qui constitue une réelle entrave à l’enracinement de la démocratie en Guinée.
Ces partis politiques, surtout ceux que l’on qualifie de « partis satellites » c’est-à-dire sans aucune base électorale se comportent à chaque période de fragilité institutionnelle comme des fossoyeurs véritables de l’unité nationale et de la dynamique de construction et développement qu’ils doivent pourtant contribuer à consolider si l’on s’en tient à leurs rôles et à leurs utilités dans un système de démocratie multipartite.
Les partis politiques depuis toujours partent pendant ces périodes d’instabilités institutionnelles en rang dispersé, laissant la suspicion et la méfiance planer plus que jamais sur eux.
Or la division pendant une telle période d’instabilité institutionnelle des formations politiques compromet le pluralisme politique et le débat contradictoire. De surcroît, cette division est susceptible de compromettre dangereusement la transition politique en cours.
Mais pour des partis politiques «satellites »avec une improbable autonomisation et une faible taux de mobilisation qui ne misent que sur l’opportunisme politique, la politique du ventre pour exister, cette division pendant cette période d’instabilité institutionnelle est plus qu’une aubaine.
Puisqu’ils sont dans une logique très claire du genre où les relations avec le pouvoir pour étouffer toute dynamique d’un véritable changement est plus importante que tout.
On constate aujourd’hui que ces partis partis « satellites » à l’image de celui de, Lansana Kouyaté, de Dr Faya Millimono, de Bah Oury ou encore de Dr Makalé Traoré peuvent être ainsi implicitement ou explicitement définis comme entièrement soumis au contrôle de la junte militaire guinéenne qui a pour objectif comme l’a laissé entendre l’actuel ministre de la décentralisation et de l’administration du territoire Mory Condé la suppression de toutes les organisations et partis politiques pouvant les concurrencer.
Cependant ces partis satellites guinéens à l’image de celui de Mamadou Sylla, de Makanera, de Kassory Fofana, de Mouctar Diallo ou encore d’ Aboubacar Sylla ont pourtant toujours échoué en Guinée.
Car une fois avec le pouvoir ils se comportent d’ailleurs, comme s’ ils étaient prisonniers d’une réflexion orientée vers les seuls mécanismes de domination verticaux du régime.
Ces « partis satellites » apparaissent donc comme des objets sans spécificité, au service d’un régime clanique, népotiste, autoritaire, ethniciste, factionnel.
En effet la prolifération de ce genre de partis politiques conduit immanquablement à concevoir les structures politiques comme totalement absorbées par le pouvoir et dépourvues de formes d’existence propres . Certes un héritage du régime autoritaire de feu président Ahmed Sékou Touré.
Car dans ce genre de régime, les organisations intermédiaires y seraient inexistantes. La « société civile » ou encore les partis politiques auraient ainsi été détruits ou étouffés dans l’œuf.
Avec l’approche de l’actuel ministre de la décentralisation et de l’administration du territoire Mory Condé, on assiste à un retour des méthodes communistes.
Pour ce faire, il faut donc transformer les « partis satellites» en des « formations alliées » qui doivent, assurer la pénétration de milieux sociaux, tels que celui de la commune urbaine de Conakry Ratoma dans lesquels la junte et ses alliés veulent s’implanter, principalement à des fins de mobilisation autour des objectifs politiques poursuivis par le régime actuel.
Au contraire, plus le désaccord avec les grands partis politiques s’accentue, plus la pénétration de ces milieux sociaux s’avère être impossible pour le régime militaire guinéen et ses formations alliés.
Tel fut d’ailleurs le cas au temps du régime de Lansana Conté tout comme au temps du régime déchu d’Alpha Condé. Ces milieux dans leur majorité sont restés hostiles à ce genre de pratiques.
Et la junte militaire guinéenne au pouvoir depuis le 05 septembre 2021 ne fera pas aussi exception à la règle, malgré les moyens financiers déployés pour pénétrer ces milieux sociaux tels que la commune urbaine de Conakry-Ratoma.
Finalement que retenir des agissements des partis politiques surtout« satellites »en Guinée ?
Une chose est sûre, leur pratique politique se justifie par la volonté de tous les partis, au pouvoir ou dans l’opposition, d’accéder à la « mangeoire » de la République, grâce aux différents postes à occuper au sein du gouvernement, des entreprises de l’Etat ou de la haute administration.
Il en est ainsi parce que les partis politiques en Guinée sont dirigés par des chefs qui semblent prédéterminés pour ce type d’arrangement particulier.
Mieux, les partis politiques sont dépourvus d’idéologie ; ce sont des partis qui se regroupent autour de personnalités. Cela signifie que leur organisation est souvent dictatoriale : la volonté du président est encore trop prépondérante.
On voit bien que la fameuse élite guinéenne se caractérise par la légèreté et l’opportunisme.
Car les hommes et femmes politiques s’illustrent par le vagabondage politique en quittant deux ou trois partis politiques souvent idéologiquement opposés. Ils évoluent au gré des vagues, selon leurs intérêts inavoués.
Le fait qu’en Guinée, très peu de partis politiques font la distinction entre leur patrimoine et celui du leader et que la confusion entre les deux patrimoines est telle que les partis politiques sont souvent considérés comme la propriété du leader rend les déficiences plus solides.
Tant que ces déficiences persisteront, le pluralisme politique en Guinée sera sans résultat probant concernant la stabilité politique, économique ou le progrès social pour ne finalement aboutir qu’à des blocages sans fin du processus de démocratisation avec éventuellement des coups d’états militaires à répétition.
Aïssatou Chérif Baldé