Patrice Emery Lumumba, dont une relique a été remise lundi à sa famille par la Belgique, est entré dans la légende le 30 juin 1960, avec un discours contre le racisme des colons qui en a fait une icône des indépendances africaines.
Circonstances de son assassinat
Premier ministre de l’ancien Congo belge devenu indépendant le 30 juin 1960 (l’ex-Zaïre, aujourd’hui la RDC), Patrice Lumumba a été renversé dès la mi-septembre 1960 par un coup d’Etat. Il avait été assassiné deux mois et demi après sa nomination par des séparatistes de la région du Katanga.
Le président congolais de l’époque, la Belgique et la CIA ont été impliqués dans sa mort, inquiets de la sympathie de Lumumba pour l’Union soviétique. Son corps avait été dissous dans l’acide.
Mais quatre décennies plus tard, un policier belge a brisé le secret, se vantant un an avant sa mort d’avoir gardé une dent. Cette dernière avait été ensuite saisie par la justice en 2016 chez la fille de ce policier.
Et c’est cette dent qu’on vient de remettre au peuple congolais et à sa famille sous la présence des autorités congolaises et belges.
Une cérémonie émouvante et une histoire sombre à Bruxelles
61 ans après son assassinat, la Belgique, ex- puissance coloniale, a restitué à la RDC, une dent du héros congolais.
Lors de cette cérémonie de remise de ces reliques constituées de l’une des dents du héros africain qui lui a été arrachée par un de ses bourreaux, le premier ministre belge parle de réparation d’injustice et de pardon.
Le premier ministre belge Alexander De Croo dira en ces termes lors de la cérémonie « Il n’est pas normal que la dépouille de l’un des pères fondateurs de la nation congolaise soit conservée depuis six décennies dans des circonstances obscures, jamais vraiment élucidées, mais ce que l’on sait ne nous rend pas fiers ».
Juliana et Roland Lumumba, les enfants du leader assassiné, et de leurs familles étaient aussi présents lors de la cérémonie. Juliana, les larmes aux yeux, avait 5 ans lorsque son père avait disparu s’est exprimé en ces termes: “Père, nous pleurons ta disparition sans avoir fait d’oraison funèbre (…) notre devoir de descendant c’était de (t’) offrir une sépulture digne”
Un pardon difficile à accepter.
Mais pour le peuple africain et congolais ce pardon est très difficile à accepter.
Car le héros africain a été victime de l’un des crimes les plus ignobles de la part de l’administration coloniale belge.
Les policiers belges qui ont commis ce crime ignoble l’ont tué et dissout son corps dans l’acide sulfurique.
Ainsi l’assassinat de Lumumba, demeure l’un des épisodes les plus sombres de l’histoire coloniale belge.
Et L’empire colonial belge fut l’un des plus plus criminels parmi les puissances colonisatrices en Afrique.
Les crimes perpétrés par l’administration belge du roi Léopold II entre 1885 et 1908 sont odieux et inhumains.
C’est un pan terrifiant de l’histoire souvent occulté, puisque ceux qui ont été victimes de ces atrocités ne font pas partie de la race des dominants et des impérialistes qui exploitent l’Afrique tuant son peuple depuis 8 siècles.
Selon l’auteur et éditeur Marc Wiltz de l’ouvrage intitulé, “il pleut des mains sur le Congo”, il s’agit probablement de 10 millions de morts.
Selon lui un sacrifice humain inouï de cruauté, une véritable mécanique de mort mise en place pour permettre à un modeste royaume européen de satisfaire ses appétits économiques, tout cela sous la pression d’un monarque prêt à tout pour avoir sa part du “gâteau africain”.
Il parle d’un pan d’histoire oublié, voire renié et qui replace la part de ténèbres d’une Europe se revendiquant pourtant déjà des lumières, une Europe convaincue de sa supériorité sur les populations africaines, tant d’un point de vue politique, économique que moral.
Une Europe qui n’a pourtant jamais voulu reconnaître ou réparer ce meurtre de masse, le premier de son histoire.
Fidèle donc à cette idéologie, l’Europe continue de renier tous les crimes contre l’humanité qu’elle a commis en Afrique. Elle exploite aujourd’hui encore le continent sur fond d’une politique néocolonialiste et impérialiste.
Et elle le fait à travers ses valets ou sous-préfets qu’elle impose à l’Afrique pour casser toute velléité d’autodétermination des peuples africains.
L’Europe du 21 siècle ne veut pas apprendre que l’Afrique ne croit pas à son messianisme sur son destin. Elle ne peut donc être son modèle, ou sa référence.
Et pourtant qu’elle le veuille ou pas ce changement est irréversible.
Aïssatou Chérif Baldé.