Accusée, blâmée, emprisonnée, mon esprit, comme du vent est resté libre.

Le 25.03. 1996 faisait de moi  prisonnière politique du régime de feu général Lansana Conté.  Il s’agissait juste d’une simple grève estudiantine pour fin d’amélioration des conditions de vie des étudiants de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry. Mais elle fut politisée sur fond d’ethnocentrisme politique par le régime d’alors. 

Étant membre du comité de défense des droits des étudiants de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry, j’étais pourtant dans mon rôle. 

Jeune et inconsciente du danger de mon engagement, je fus après mon arrestation en ce jour du 25.03. 1996 sur le campus de l’université Abdel Gamal Nasser de Conakry par des militaires armés jusqu’au dent déférée à la maison centrale de Conakry. 

Kerfalla KPC Camara espion du régime Conté et l’ancien recteur de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry, Mr Kaba étaient les premiers responsables et témoins de cette arrestation arbitraire. 

Mon interrogatoire par le commissaire de police Abou Camara au commissariat de police de Commandanya dans Conakry marquait le début de ma torture humiliante. Car nous fûmes passés à tabac par cet homme injurieux, irrespectueux, barbare, puisqu’on refusait de reconnaître les chefs d’accusations contre nous tels que trouble à l’ordre public, rébellion, destruction d’édifices privés et publics…

Arrivée à la maison centrale de Conakry, je fus victime d’abus, de sévices atroces, cruels et surtout d’humiliations et de déshonneurs.

Et c’est juste en ce moment que je commençais à réaliser à quel point les tenants du pouvoir guinéen peuvent être sauvages et barbares.

Les 4 mois passés à la maison centrale de Conakry m’ont permis de comprendre aussi pourquoi cet État n’est fondé que sur le sang et les larmes des faibles, des pauvres, des hommes intègres tels que Diallo Telli et tant d’autres tombés depuis l’indépendance sans justice pour eux.

Et c’est pour toutes ces raisons que j’ai fait le choix encore aujourd’hui de refuser d’accepter l’énormité, la décadence des valets de cet État pour continuer à faire asseoir la tyrannie.

Je suis en effet outrée de savoir qu’après plus de 20 ans d’exil, les hommes et femmes de la Guinée ne veulent point changer. Car dans ce pays où tout change pour que rien ne change, les bourreaux d’hier peuvent devenir facilement des héros. 

C’est plus qu’une désillusion de se rendre compte que tout se refait selon le même scénario dans ce pays, pas de rupture, l’ordre des choses reste inversé. Les valets de l’État veulent juste baffer, tuer, jouir, se reproduire, polluer. 

Ils ne cherchent pas de rupture, ils veulent juste consommer plus, placer leur progéniture plus près de la mangeoire. 

Le bas peuple continue pourtant de se plaindre de la  tyrannie de l’État mais obéi paradoxalement à d’autres tyrans et en fabrique tous les jours de nouveaux candidats à la tyrannie.

Car dans ce pays chaque président de parti politique est un tyran en gestation et chaque commis de l’État un sous- dictateur.

Le peuple préfére donc se faire broyer et se rebeller dans la désunion ou plutôt écraser à leur tour ceux qui sont en dessous d’eux. 

Le plus intriguant est le fait que ce soit sous le règne d’un juriste de formation, un opposant historique censé être un homme d’honneur que l’on continue  d’humilier, d’emprisonner des opposants politiques et de les laisser surtout mourir en prison.

Or, pour un juriste conscient et responsable, une seule injustice, un seul crime, une seule illégalité, une seule injure à la justice et au droit, un seul crime suffit à perdre d’honneur et à déshonorer tout un peuple. Un juriste ne doit donc pas tomber bien bas. 

Mais le président juriste guinéen est tombé bien bas. Il a préféré pactiser avec l’élite guinéenne, ces bandits de grands chemins qui font usage de tous les maux contre les faibles et les pauvres. 

Étant témoin vivant de l’énormité de cette élite irresponsable, de cette horde de loup affamés prête à marcher sur le cadavre de plusieurs innocents pour atteindre le sommet, je m’indigne donc.

Et il le faut, car ceux qui étaient à la base de mon emprisonnent suivi d’humiliation, d’abus des militaires sur moi tels que Mr. Kerfalla KPC Camara, l’ancien recteur de l’université Mr Kaba, l’ancien ministre de la justice sous le régime Conté Abou Camara ont atteint le sommet de l’État ou sont devenus des hommes influents grâce à leur négativité. C’est leur négativité qui a séduit et séduit encore aujourd’hui les guinéens. 

Respect des forts, mépris des faibles, amour de l’argent, désir d’inégalité, d’injustice, de domination. 

Alors je ne peux pas oublier le 25.03.1996 même si j’essaie de pardonner.

Je ne peux pas me taire, même si certains de mes bourreaux sont considérés aujourd’hui en Guinée comme des dieux sur terre. 

En somme qui croire dans ce pays, qui pour rompre avec cette injustice et cette humiliation permanente des opposants politiques, des faibles, des cadres intègres pour que la Guinée puisse retrouver le chemin de la paix, la liberté et l’unité ? 

Quant à moi, je continuerai d’être un esprit libre. Et de mon trou diasporique je reste debout, avec ma plume comme seule compagne intègre, ma besogne éreintante. 

Courage à Foniké Mengé Sylla, Ousmane Gaoual Diallo et tous les prisonniers politiques en Guinée. 

“Seul le corps peut aller en prison, l’esprit ne peut être prisonnier, on ne peut pas attraper le vent”. 

# Aissatou Cherif Baldé.

Un commentaire

  1. L‘Afrique et fière de toi nous ?? on ne fière de toi ??

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