Guinée: L’instauration d’un système de parti politique institutionnalisé seule voie vers l’alternance démocratique pacifique.

Les agissements de l’actuelle classe politique et en premier lieu le professeur Alpha Condé mettent à nu le comportement de “big man” à la place d’un chef d’État ou chef de parti politique au modèle démocratique en Guinée. Des leaders politiques de tels acabits n’ont pour objectif que d’imposer aux peuples des partis hégémoniques dominants. 

Le  président de la République, pionnier de cette stratégie, a dès son arrivée au pouvoir décidé d’imposer aux Guinéens un parti hégémonique dominant. Sur ce, le projet de tripatouillage constitutionnel fût l’une des voies prisée pour y parvenir, puisque cette manipulation de la démocratie lui a permis d’avoir une constitution taillée sur mesure. 

Le hic est que ce genre de parti politique s’active certes à organiser des élections pour prouver son attachement aux principes fondamentaux de la démocratie, mais au fond les résultats de ces élections sont obtenus par le biais de fraudes électorales, de tricherie et de l’achat de conscience des électeurs manipulées selon des bases irrationnelles tel que le communautarisme à outrance. 

Ce qui signifie que les autres partis ont le droit d’exister, mais la possibilité d’une alternance demeure utopique. D’où la dangerosité de ce genre de parti et son caractère antidémocratique. 

En effet, la naissance de tels partis politiques est rendue possible par le fait que la Guinée ne regorge que des partis notables avec en leur tête des « big man », c’est-à-dire des personnages influents et  entourés de démagogues et de flagorneurs, grâce au recours systématique  du clientélisme. Ces personnages agissent à rebours puisqu’ils puisent leur pouvoir (y compris économique) dans leur capacité à contrôler et à utiliser les structures et les ressources publiques. 

Et ce genre d’organisations politiques est caractérisé par sa faiblesse organisationnelle et demeure surtout très centralisé et immaculé par des pratiques paternalistes et informelles difficiles à saisir. Les actions sont souvent mal coordonnées et incohérentes. 

Et de tels facteurs facilitent l’enracinement des partis dominants, comme ce fut le cas du  PUP de feu Lansana Conté et  ce qui risque un jour au RPG Arc-en-ciel, post du Pr Alpha Condé et l’UFDG de Cellou Dalein Diallo. 

À côté de ces facteurs cités ci-dessus, ils existent bien d’autres favorisant la naissance d’un tel parti. 

C’est le cas notamment de la naissance des partis communautaristes qui constituent aujourd’hui une sérieuse entrave à la consolidation de la transition démocratique en Guinée. Car partout où des pareils partis se forment et cristallisent leur base électorale, les élections deviennent des simples exercices permettant de mesurer la dimension démographique d’une ethnie, autrement dit une sorte de recensement. 

Cet état de fait nuit le déroulement des élections compétitives et rend difficile l’acceptation mutuelle et la consolidation démocratique. Malheureusement, c’est le cas guinéen. 

Ainsi pour favoriser l’instauration d’un système démocratique consolidé, le système de parti politique institutionnalisé demeure impératif.  À l’évidence, institutionnaliser les partis politiques est le seul moyen de faire d’eux des organisations durables, ancrées dans la société ; de facto, légitimes, stables et efficaces sur le terrain, susceptibles de contribuer de façon positive à la consolidation de la démocratie. 

Pour ce faire, il faut encourager en premier lieu l’alternance au sein des partis politiques dans le respect des règles de jeux démocratiques, en organisant des congrès pour le renouvellement des instances du parti suivant tous les échelons. 

Force est de constater que la plupart des leaders des partis politiques actuels ne sont que des présidents à vie, hostiles à la contradiction ou toutes idées de compétitions électorales pour ce qui est de leur poste. Cette pratique de l’éternel plébiscité faisant le leader de l’homme providence ou d’un dieu intouchable, constitue une entorse à l’éclosion d’une vraie démocratie au sein de nos formations politiques d’une part et l’alternance démocratique à l’échelon national d’autre part. 

Une telle situation ne favorisera sans doute qu’une démocratie de façade avec un système au sein duquel les citoyens sont privés de leurs droits et sont condamnés à être des électeurs politiquement apathiques. 

Pour inverser la donne dans un proche avenir, le principe voudrait que  le peuple s’intéresse de manière responsable et citoyenne au passé de leurs hommes et femmes politiques pour éviter l’arrivée d’un second Alpha Condé à la magistrature suprême. 

À défaut la  démocratie, qui est à l’origine associée à des grands espoirs d’autodétermination politique et de sauvegarde de la paix intérieure, ne sera plus qu’une coquille formelle dans la structure réelle de la société. Elle sera réduite à une  simple mise en scène d’élections périodiques, où la population ne peut choisir qu’un parmi  le « spectre d’élites » qui lui est offert. 

La démocratie réelle quant à elle sera illusoire comme le cas dans la plus parts des pays africains où le débat public libre est remplacé par la gestion des opinions et de l’indignation ; le principe directeur du citoyen responsable cède sa place à un idéal néo patrimonial. 

Et ce changement ne sera rendu possible qu’avec des partis électoraux favorisant la transformation radicale dans l’organisation et les stratégies politiques, notamment avec l’émergence de partis politiques institutionnalisés. Faute de quoi, on restera toujours dans une démocratie à la façade et un système de gouvernance à la solde d’une faction de voraces et de vautours.

Aissatou Chérif Baldé

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