Il n’existe aucune raison valable pour soutenir un putsch constitutionnel au Sénégal.

À l’entame, on ne peut pas s’opposer au tripatouillage constitutionnel en Guinée et soutenir Macky Sall dans sa velléité d’enterrer l’alternance démocratique au Sénégal

Macky Sall, président sénégalais depuis dix ans veut aussi suivre ce qui semble être le sillon tracé de tous les présidents dévots, valets de la France tels que Paul Biya (Cameroun), Ali Bongo (Gabon), Sassou N’Guesso (Congo Brazzaville), Idriss Deby (Tchad), Faure Gnassingbe (Togo), Alhassane Ouattara  (Côte d’Ivoire), Patrice Talon (Bénin) Alpha Condé (Guinée) qui nous sont malheureusement familiers. 

Cependant il faut rappeler que cette pratique, vecteur d’instabilité politique qui gangrène la politique des pays francophone d’Afrique pose la question des enjeux démocratiques et du troisième mandat présidentiel au Sénégal, mais aussi sur le reste du continent africain.

Que signifie le tripatouillage constitutionnel? 

Le tripatouillage constitutionnel propre à l’Afrique consiste à faire évoluer la constitution pour l’adapter à des besoins contingents; c’est-à-dire faire sortir la Constitution de sa finalité fondatrice qui est d’être un instrument de régulation au service des populations. 

Ainsi la constitution est instrumentalisée pour une mauvaise cause, celle de vouloir faire prévaloir des intérêts partisans et individuels et pour le seul bénéfice de ses auteurs.

Le Psdt Macky Sall à l’image de son aîné Alhassane Ouattara veut tripatouiller la Constitution pour s’offrir un troisième mandat. 

Il veut user des manœuvres antidémocratiques qui vont détruire à petits feux le peu dont le Sénégal pouvait se glorifier dans une Afrique peu regardante sur ce que la démocratie veut dire.

Or cette pratique a pourtant révélé que ces situations participent sans conteste à l’affaiblissement de la démocratie et de l’État de droit; elles peuvent durer le temps de l’instant mais elles ne survivent jamais au-delà de ce que la volonté populaire réprouve. 

Le coup d’État constitutionnel est vraiment symptomatique du chaos suscité par la volonté d’un chef d’État de briguer un troisième mandat de trop. 

Et l’affranchissement de la limitation des mandats peut conduire certains présidents des pays concernés à leur perte.

Ce fut le cas du président Alpha Condé qui fut démis de ses fonctions le 5 septembre 2021,  par le Groupement des Forces spéciales, une unité militaire qui était dirigée par l’actuel président guinéen Mamady Doumbouya. 

Moins d’un an auparavant, il avait été réélu pour un troisième mandat contesté sur fond de tueries et d’emprisonnements. 

Le président Macky Sall va-t-il briguer un troisième mandat ? 

En tout cas, tout porte à croire qu’il veut bien briguer un troisième mandat sur fond de tripatouillage constitutionnel. 

Fort d’un résultat très serré entre lui et l’opposition politique en sa faveur lors des dernières élections législatives, il maintient le flou sur ses intentions et gère le pays de façon de plus en plus arbitraire. 

Il multiplie depuis des mois la répression contre les opposants  qui militent pour la limitation à deux mandats présidentiels et fait de la censure et de la restriction des libertés d’expressions son instrument favori pour étouffer toute opposition à son projet de troisième mandat. 

En septembre 2022, il a annulé le concert panafricain qui était prévu à Dakar le 17 septembre. 

Ce concert devait être le démarrage d’une campagne citoyenne pour sensibiliser sur les enjeux démocratiques et les conséquences du tripatouillage constitutionnel. 

On peut lire aujourd’hui par exemple sur le site du groupe média Walfadjri ceci:« Le Pouvoir ne veut pas que la situation qui dégénère à Mbacké soit médiatiquement couverte. Après avoir appelé Me Cheikh NIASS pour lui signifier que WALFTV devait arrêter la diffusion en direct des échauffourées de Mbacké, Babacar DIAGNE a mis en exécution ses menaces. En effet, le directeur du CNRA a fait couper le signal de la télévision du Groupe Walfadjri qui n’émet plus sur le TNT ». 

Selon Walfadjri leur signal a été coupé parce que leurs envoyés spéciaux ont montré en direct les images d’affrontements entre les partisans de Ousmane Sonko et les forces de l’ordre. 

Lors de la manifestation du 17 juin, des violences ont éclaté à Dakar lorsque des manifestants ont voulu accéder à la Place de la Nation, barricadée par les forces de sécurité, ainsi qu’à Bignona et Ziguinchor. Trois personnes y ont perdu la vie.

Sans doute, l’un des meilleurs élèves du système criminel françafrique veut dévoiler aux sénégalais sa vraie face, celle d’un personnage antidémocratique voire dictateur des temps contemporains sous les tropiques. 

Il veut expérimenter un troisième mandat du président Abdoulaye Wade de 2012 ayant pourtant conduit à son élection. 

Néanmoins Macky Sall fort du soutien de la France néocolonialiste en bon farouche opposant de l’Afrique des libertés, adepte de la politique françafrique dont l’ultime objectif est le maintien de l’africain sous l’emprise spectrale du maître afin de continuer à croire au messianisme de la France sur le destin de l’Afrique, veut pousser le Sénégal vers le chaos. 

Mais le Sénégal est différent de la Guinée 

Même si la démocratie sénégalaise souffre aussi de graves  imperfections, ce pays a la chance d’avoir une jeunesse, une société civile dynamique, et des partis politiques réfléchis et mâtures. 

Les Sénégalais refusent de ne surfer que sur la carte ethniciste pour imposer aux peuples des partis politiques hégémoniques, dominants et ethnicistes. 

Car ce genre de parti s’active certes à organiser des élections, comme c’est fut le le cas du RPG-arc-en-ciel guinéen, mais leur résultat l’est également (par la fraude électorale ou d’autres moyens). 

Et les autres partis ont le droit d’exister, mais la possibilité d’une rotation du pouvoir c’est à dire d’une alternance n’est en aucun cas envisagée ou envisageable.

Ce sont des partis politiques qui sont le plus souvent caractérisés par sa faiblesse organisationnelle et demeurent surtout très centralisés et caractérisés par des pratiques personnalistes et informelles difficiles à saisir.

Il s’agit des partis notables avec en leur tête des « big man », c’est-à-dire un personnage influent et bien entouré, principalement grâce au recours systématique  du clientélisme. 

Le pouvoir du chef à l’image des chefs des partis politiques guinéens est donc immuable, inaltérable, indestructible, rendant l’alternance même au sein du parti  impossible. 

Le peuple du Sénégal contrairement aux peuples de Guinée est donc peu réceptif à ce genre de parti politique. 

Les Sénégalais dans leur grande majorité disent non aux partis politiques ethnicistes. 

Car partout où les partis ethniques se forment et cristallisent leur base électorale, les élections deviennent dans un tel contexte de simples exercices permettant de mesurer la dimension démographique d’une ethnie, une sorte de recensement au fait. 

Cela nuit au déroulement d’élections compétitives et rend difficiles l’acceptation mutuelle et la consolidation démocratique, comme c’est le cas en Guinée actuellement. 

Face à un tel peuple déterminé, mur, assoiffé de liberté et las d’être sous l’emprise spectrale de la France, Macky Sall ne peut pas réussir son projet de coup d’état constitutionnel. 

Pas de raisons valables pour soutenir un troisième mandat 

Ce qui est valable pour Alpha Condé, est valable aussi pour Macky Sall car il n’existe pas de raisons valables de s’accrocher au pouvoir. 

Le plus souvent, les présidents pantins de la France avancent que pour des raisons du contexte sécuritaire ou pour la stabilité du pays, il faut nécessairement un homme d’expérience capable de conduire le pays. 

Or, il est inimaginable de croire que personne d’autre ne peut conduire le pays en dehors du président en place tel que Macky Sall par exemple. 

L’autre argument que placent les putschistes constitutionnels est de dire que l’équipe en place a lancé un certain nombre de projets et qu’il faudrait les laisser au pouvoir pour poursuivre ses actions-là. 

Sauf que lorsqu’un président est élu, la durée du mandat est déjà déterminée. Il sait donc qu’il a un temps imparti pour mettre son programme en œuvre. On ne peut pas dire que ceux qui défendent la thèse de continuer ce qui a été engagé seraient surpris en quelques sortes par le temps. Mieux, l’État c’est la continuité n’est ce pas pas. 

Ces chefs d’État tels que Macky Sall, Alhassane Ouattara, Alpha Condé qui cherchent à conserver le pouvoir ne le font pas par dévouement excessif pour le peuple, mais pour conserver des avantages personnels.

Et c’est du dilatoire, des stratégies de confiscation du pouvoir parce que ceux qui sont en place ne veulent pas jouer le jeu démocratique.

Ils ne sont pas élus pour le peuple africain, ils sont élus pour faire valoir l’intérêt des puissances néocolonialistes tutélaires éternelles dont l’opinion sur ce que nous sommes semble être vital pour un Macky Sall et tant d’autres sur le continent. 

Sauf que les Africains ne  peuvent et ne doivent pas se laisser faire. Ils ne doivent pas se laisser faire du moment où le temps du sursaut ne peut attendre;il est le temps de la vie qu’on ne saurait perdre pour l’ignominie des despotes fabriqués par la France. 

Aïssatou Chérif Baldé 

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