Tchad: les deux poids deux mesures de l’État français.

Le président français Emmanuel Macron qui ne rate aucune occasion pour donner des leçons de démocratie aux autorités africaines surtout celles maliennes sait aussi pourtant briller par un silence religieux, lorsqu’il s’agit de la transition politique en cours au Tchad et en Guinée. 

La junte militaire guinéenne dirigée par un ancien légionnaire français avec une transition déjà biaisée sur fond de manipulation, de diversion et d’oppression ne dérangent pas le président français Emmanuel Macron. Au contraire, la junte guinéenne peut compter sur le soutien de l’État français. 

Il en est de même pour le Tchad qui est en train de devenir à l’image du Togo ou du Gabon la prochaine transition monarchique sur le continent Africain. 

Les autorités françaises et leurs alliés ne se gênent pas de se montrer plus ambiguës avec les autorités militaires et les gouvernements despotiques qui servent leurs intérêts sur le continent. 

Il existe donc selon la logique de Macron de mauvais coups d’Etat et de bons coups d’Etat. Celui du Mali serait donc un mauvais coup d’État militaire, tandis que celui de la Guinée et du Tchad peuvent être qualifiés de bons coups d’État militaires. 

Une vision néo-impériale qui sous-entend que les peuples africains ne méritent pas la démocratie. Il faut imposer aux peuples africains des hommes et femmes aliénés qui vont perpétuer la domination du maître. Les acteurs étatiques doivent forcément devenir l’allié, « la voix du maître » blanc, et participer ainsi à la fragilisation des régimes politiques que le maître met à mal depuis l’indépendance par des coups d’états, des assassinats de leaders. Et ça ne change pas depuis plus de six décennies. 

L’investiture du putschiste tchadien

En effet, Mahamat Idriss Déby a été officiellement investi comme président de la transition ce lundi 10 octobre. La cérémonie d’investiture a eu lieu à l’issue du Dialogue national inclusif, boycotté par une grande partie de l’opposition et de la société civile tchadienne.

Du côté du gouvernement Français et de la fausse communauté internationale aucune réaction musclée, aucun dénigrement des autorités de N’djamena, aucune attitude va-t-en-guerre vis-à-vis de la junte au Tchad. 

 «La France ne laissera jamais personne, ni aujourd’hui, ni demain, remettre en cause la stabilité et l’intégrité du Tchad. [J’appelle à promouvoir] la stabilité, l’inclusion, le dialogue, la transition démocratique», avait ainsi déclaré Emmanuel Macron lors de funérailles d’Idriss Déby. 

Et cette déclaration met à nu les deux poids deux mesures de l’État français en Afrique sur fond d’une vision néo-impériale. 

Les médias français (RFI, France 24, TV5) transformés en des caisses de résonance de l’impérialisme mélanophobe français n’ont pas manqué d’éloge à l’égard du nouveau chef de la dynastie despotique tchadien à la solde de l’impérialisme français. 

Propositions du comité ad hoc

Pour rappel, cette investiture du jeune despote est la suite logique des propositions rendues public le Mercredi 29 septembre par  le comité ad hoc mis en place par la présidence du dialogue national inclusif au Tchad. 

Ce comité a présenté ses propositions parmi lesquelles la validation des candidatures aux prochaines élections des membres de la junte qui dirigent le Tchad depuis avril 2021.

Les participants au dialogue national non inclusif au Tchad ont adopté “définitivement” le rapport de la commission ad hoc sur “la forme de l’État, la constitution, les réformes institutionnelles et le processus électoral”. 

Position de L’UA, de l’opposition politique et de la société civile tchadienne

Une violation grave des dispositions de lois du pays que l’opposition et tout comme la société civile tchadienne n’ont pas manqué de dénoncer. 

Et dans son communiqué du jeudi 29 septembre, l’UA a aussi réagi face à la mise en place d’une nouvelle dynastie despotique dans ce pays de l’Afrique Centrale. Elle a par la voix du conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’Union Africaine (UA) a réitéré, son appel aux autorités de transition tchadiennes, à respecter la période de 18 mois pour l’achèvement de la transition et a rappelé sans équivoque qu’aucun membre du Conseil militaire de transition (CMT) ne pourra être candidat aux prochaines élections.

Sauf que le jeune président tchadien soutenu par le gouvernement français, syndicat des pouvoirs obscurs, despotiques en Afrique ne va certainement accorder aucune importance à la déclaration de l’union africaine

Héritier prévu d’une transition monarchique

Mahamat Idriss Déby a obtenu juste après l’annonce de la disparition du président Idriss Deby tué selon la version officielle des autorités tchadiennes en avril 2021 au combat, le soutien de l’État français. Le chef de la nouvelle dynastie despotique, un général quatre étoiles âgé de 37 devrait donc conformément aux règles du système criminel françafrique remplacé son père. 

Et c’est pourquoi le conseil militaire mis en place par l’armée s’était aussitôt réuni et a promulgué la charte de transition jusque-là inconnue des peuples tchadiens. 

Le Tchad est donc transformé grâce au concours du système mafieux françafrique en une sorte de transition monarchique qui ne dit pas son nom.

L’union africaine assiste impuissamment à une succession de père en fils. 

La République tchadienne 

devient héréditaire à l’image de celle du Togo et du Gabon. 

Mahamet Deby, fils d’Idriss, devient donc président de transition au Tchad avec la bénédiction de la France, et de toute la communauté internationale. 

On a fait un coup d’État militaire puisque ce qui était prévu par la constitution, c’était une présidence intérimaire assurée par le président de l’Assemblée nationale. 

Mais la violation aggravante de la constitution n’a pas dérangé le président français Emmanuel Macron pourtant prompt à discréditer, dénigrer les auteurs du coup d’État militaire malien et la jeunesse panafricaniste actifs sur les réseaux sociaux, en les qualifiant d’être des manipulés de la Russie, ou de la Turquie. 

L’alibi démocratique de la France. 

Ces exemples démontrent à quel prix la France sur l’alibi démocratique continue à piller ces pays et tout en leur privant des transitions démocratiques consolidées. 

La France, à l’instar  de toutes les anciennes puissances coloniales, vu l’avancée menaçante de la Chine, de la Russie, de la Turquie (pour elles)  n’a jamais eu autant besoin de renforcer sa présence en Afrique sous prétexte d’instaurer des régimes fondés sur la démocratie. Or elle y arrive  au prix de l’ingérence, de la subversion et de la guerre.

Éveil de conscience, une impérieuse nécessité. 

Pillée et humiliée, l’Afrique se doit de tirer le maximum d’enseignements de cette réalité en apprenant à distinguer les conséquences des actes de sabotage économique et de déstabilisation des dirigeants qui osent dire “non” de la mauvaise gestion que les démocraties occidentales savent, du reste, pardonner tant que leurs intérêts ne sont pas menacés.

Il serait donc naïf de la part de la jeunesse africaine, tchadienne, guinéenne de penser que cette France impérialiste, de même que cette fausse communauté internationale, va contribuer à l’instauration d’un système démocratique fiable et consolidé en Afrique. 

Sachez bien que les transitions démocratiques en Afrique et particulièrement en Guinée, au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Togo, au Bénin bref dans toutes les colonies françaises ainsi que le vote ne servent qu’au renouvellement du personnel local du système-monde au service de l’impérialisme mélanophobe. 

Les électeurs locaux que sont les peuples africains en deviennent, à leur propre insu, des clients de la politique spectacle et les victimes des rapports marchands qui lui sont sous-jacents. 

Et les sujets qui peuvent écorcher les oreilles du G7, de l’UE  tel que le pillage des matières premières de l’Afrique, le diktat des grandes puissances, la dette extérieure, les réformes néolibérales sont soigneusement écartés du débat électoral quand débat il y a.

Donc réveillons nous, car il n’existe  pas de préalables conduisant l’intellectuel africain,la jeunesse africaine à croire au messianisme de la France sur le destin de l’Afrique!

Et il faut refuser de cautionner cette idée de l’Occident dénoncée par Césaire sur l’incapacité de l’Afrique à avoir puissance sur son propre destin. 

Car en le faisant on devient le cheval de Troie de l’ancien maître tels le sont devenus aujourd’hui Alassane Ouattara, Macky Sall, Faure Eyadema, Sassou N’Guesso, Paul Biya, Ali Bongo, Patrice Talon et maintenant Mamady Doumbouya et Mahamat Idriss Déby. 

Aïssatou Chérif Baldé 

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