Assises nationales en Guinée: Une autre manœuvre dilatoire de trop.

S’il y a une chose sur laquelle les Guinéens sont d’accord, c’est sur le fait que la junte militaire guinéenne, dont les membres restent encore inconnus a fini par ruiner a travers des communications malheureuses, des agissements inopportuns et des décisions politiques clivantes et claniques sa légitimité. 

Le prestige moral que la junte militaire guinéenne a obtenu le lendemain du coup d’État militaire survenu le 05 septembre continue de s’effondrer. 

Pourra-t-elle donc à travers les assises nationales envisagées recoller les morceaux de verre qu’elle a cassé? 

Il n’est jamais trop tard pour bien faire, pourrait-on dire . 

On peut donc prétendre qu’elle peut outre mesure atteindre ces objectifs au cas où elle parvient à convaincre le peuple des changements nécessaires sur fond de sincérité, de transparence, de justice, d’équité et d’égalité. 

En le faisant, cela pourrait s’avérer être le moyen le plus rapide pour que la Guinée retrouve rapidement sa stabilité qu’elle a toujours mérité avoir.

Mais compte tenu du fait que cette junte militaire souffre depuis son arrivée au pouvoir d’une incommunicabilité notoire et d’une insincérité pesante, cette mission paraît être impossible. 

Le ministre de la décentralisation et de l’administration du territoire M Mory Condé chargé d’organiser ces Assises entre le 22.03.22 au 29.04.22 fait non seulement preuve d’amateurisme, et donne surtout l’impression que les assises se font à la va-vite et sans apporter la réflexion nécessaire. 

Déjà on remarque qu’à travers la crispation socio-économique et politique actuelle, qu’il n’existe pour l’heure aucun engouement ou vif intérêt pour la question des assises nationales. 

On a comme l’impression que la population guinéenne n’enregistre même pas que des Assises sont organisées en Guiné. 

Et pourtant la Guinée n’a jamais connu de telles consultations nationales par le passé pour expliquer cette indifférence et manque d’engouement de la part du peuple. 

Quant à la classe politique guinéenne, si elle arrive dans la situation à manquer d’engouement préférant formuler des griefs contre ces Assises. 

On ne peut que lui donner raison. Car tout porte à croire que les assises nationales de la refondation ne sont pas une aubaine pour instaurer entre toutes les filles et tous les fils de ce pays un dialogue franc et direct, afin d’atténuer les querelles infécondes qui tendent à miner le processus de transition en cours. 

M Mory Condé et son chef de clan factionnel Mamady Doumbouya cherchent à travers des assises mal ficelées à jeter de la poudre aux yeux des Guinéens pour retarder le retour à l’ordre constitutionnel et empêcher le peuple de se focaliser sur l’essentiel. 

Ce dialogue qui n’en est pas un se transformera de par sa nature non inclusif et mal préparé en une sorte de confrontation politique pour clouer toutes les gorges. 

Les Assises de Mory Condé, si on peut les appeler ainsi, ne sont rien d’autres qu’une énième manœuvre dilatoire destinée à prolonger la transition, de la part d’un gouvernement “sans repère, ni boussole”. 

Elles ne peuvent donc pas être présentées par les autorités de transition comme un moment crucial de la transition ouverte depuis le putsch de 2021. 

Cette transition politique en cours a perdu son essence et son sens. 

La junte militaire guinéenne est en train de faire perdurer une transition qui est à équidistance de la démocratie et de la tyrannie, de la violence et de la civilité. 

Tout comme son prédécesseur, Mamady Doumbouya ne réalisera aucune véritable avancée de la consolidation de la démocratie et de la pacification des relations sociales en Guinée. 

Et face à cette situation, Mamady Doumbouya  contrairement à Alpha Condé, ne laissera pas les forces de sécurité faire usage de violence physique contre les contestations. 

Il va plutôt procéder à un déploiement d’une violence judiciaire par la criminalisation de toute contestation ou encore des opposants politiques. 

À cette violence par l’aléa dans l’application du droit, il fera usage de la violence économique exercée par un partage ultra-partisan et ultra-nepotiste des opportunités économiques créées par les pouvoirs publics, des violences d’exclusion et de discrimination subies par des couches de population faiblement protégées. 

Et la junte militaire guinéenne est déjà dans cette logique. 

Par ailleurs, même si ces Assises accouchent des recommandations en vue de réformes destinées à remédier aux maux du pays pris dans la tourmente depuis 2009. 

Leurs applications vont se heurter comme toujours à l’opposition de la confrérie de Mamady Doumbouya opposé à tout changement systémique et développement du pays. 

De telles consultations nationales dans un pays pris en otage par une classe oligarchique qui s’adonne trop au clanisme, à l’ethnisme politique depuis 1958 seront vaines. 

Pour finir, comment cette junte militaire qui fait la promotion des médiocres peut encadrer de telles assises?

Car pour la réussite d’une telle assise, organisée dans le but de redessiner le mode de gouvernance et de reconstruire le citoyen Guinéen, il faut impérativement mettre en place des groupes de travail encadrés par des experts.

Et avant le début des assises, les autorités de la transition devraient clarifier la portée des recommandations finales. 

Elles doivent dire au peuple de Guinée si les recommandations finales issues de travaux de cette phase nationale seront exécutoires ou pas. 

Ces Assises étant donc très loin d’avoir une telle portée. Elles restent donc comme toutes les autres initiatives de la junte une manœuvre dilatoire pour se pérenniser au pouvoir. 

Aïssatou Chérif Baldé. 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *