Cette rencontre du 02.10.21 organisée par l’association guinéenne AGASCA e.V à Dortmund fut marquée par la présence de Mme Baldé Aissatou Cherif, présidente de l’association Guinée-Solidaire-Organisation et l’avocat M Johannes Palm de ladite organisation.
Ce fut une belle occasion pour discuter des préoccupations de la communauté guinéenne de l’Allemagne et parler sans tabou dans un langage franc et sincère des causes de l’immigration mortelle des jeunes guinéens et africains.
Des causes qui sont à la fois internes et externes et pour ce faire très difficiles à cerner puisque très complexes et liées de façon intrinsèques.
Les causes externes restent liées à la volonté manifeste des pays européens de refuser à l’Afrique un développement axé sur les besoins des pays africains afin de continuer de faire de ce continent riche, le fournisseur des matières premières pour la survie du développement socio-économique européen.
Et les causes internes quant à elles, trouvent leurs origines dans les injustices, les inégalités sociales, la défaillance de l’État, la défiguration de la démocratie, favorisée par le manque de pédagogie politique, de patriotisme, de probité morale d’une poignée d’élite décérébrée à la solde.
L’un des pays africains le plus touché par cette immigration mortelle est bien évidemment la Guinée qui vient pourtant de souffler ses 63 années d’indépendances.
Mais, la Guinée se trouve encore aujourd’hui à la croisée des chemins et on parle de refondation de l’État.
Et malgré que le peuple de Guinée ait refusé le calme honteux d’un joug doré, préférant la garde soucieuse d’une fière indépendance, ce peuple surtout la femme guinéenne ne jouit toujours pas pleinement de son indépendance.
Car avec 63 d’indépendances passées, beaucoup de jeunes guinéens préfèrent encore faire le choix de l’immigration mortelle pour finir comme cadavre dans les tréfonds de la Méditerranée devenue le plus grand cimetière marin.
Et 63 ans d’indépendances la jeunesse guinéenne manque de perspective, de travail, une éducation de qualité, d’assistance de l’État, or l’avenir du pays repose sur elle.
Les jeunes femmes guinéennes victimes de mariage forcés, de pesanteurs socioculturelles, d’inégalités, d’injustice en Guinée désertent l’école pour prendre le chemin de l’immigration mortelle.
Malgré 63 d’indépendances une grande partie de la diaspora guinéenne bien formée avec une carrière professionnelle impeccable préfère par manque de perspectives d’avenir en Guinée restez à l’étranger.
L’État guinéen peine toujours à reconnaître l’importance de la femme guinéenne pour le développement du pays.
Il tarde à rétablir les fondements de la famille, restaurer la valeur de l’enfant, alléger la penibilité de la vie de la femme, lui reconnaître sa dignité en systématisant sa scolarisation en améliorant ses conditions de travail et en valorisant son rôle de mère et son statut de femme et de citoyenne et à tel point qu’elles quittent aussi le pays.
Une situation qui entraîne l’absence de la femme guinéenne aux postes de responsabilités même dans les partis politiques où elles n’occupent que des rôles récréatifs.
Or, le pays dispose de plus en plus de femmes cadres, mais l’accès à des postes de responsabilité reste verrouillée.
Après 63 ans d’indépendances, pour qu’une femme occupe un poste de responsablité elle doit forcément être jugée non sur ses caractères et qualités intellectuelles mais plutôt que sur leur pouvoir de séduction.
Le droit de travailler et d’être indépendante financièrement s’accompagne quant à lui d’une obligation de combiner un boulot à temps plein avec la prise en charge des enfants et de la plus grande part des tâches ménagères, tout en continuant à se faire belle.
En fin de compte, la confiance acquise par ces femmes cadres guinéennes par le droit de participer davantage à la vie politique, sociale, culturelle et économique de la société est constamment minée par la remise en question permanente de leur valeur sur le « marché de la beauté».
Une situation devenue contraignante et en même temps normal puisque depuis 63 ans la Guinée ne connaît que le même scénario: Naissance de régime autocratique, rébellion, coup d’état constitutionnel, coups d’état militaires, défiguration de la démocratie, pauvreté, violence et violation graves des droits des peuples.
L’élite au pouvoir en Guinée est juste un oppresseur contrairement au colon venu de l’intérieur avec un fouet qui nous méprise parce qu’elle nous oppresse.
La route pour un réel changement surtout celui des normes et des rôles de genre calqués sur nos réalités peut paraître longue, mais reste faisable, c’est surtout une question de volonté politique et d’engagement.
Après plus de 63 ans d’indépendance bâti sur un fondement de charbon et d’acier, il est temps d’inverser la donne et c’est possible avec une transition apaisée de deux ans.
Alors M le président Mamady Doumbouya, certes les efforts à faire et les sacrifices à consentir peuvent donc paraître abyssaux, mais avec une ferme détermination à la mesure de ce périmètre que vous définissez, tout est possible.
Il faut refuser surtout d’être comme vos prédécesseurs c’est-à-dire “Un sublime corrupteur, décérébré, entouré de corrupteur et imbu du pouvoir ».
Et accepter de mettre en avant une gouvernance vertueuse permettant une prise en charge efficace de la lutte contre la précarité, l’impunité, les vulnérabilités et les injustices sociales.
Ainsi vous y arrivez !
Aïssatou Chérif Baldé