Madame Djené Kaba: Une première dame guinéenne sans influence?

La première dame guinéenne Mme Djené Kaba est sortie de ses gonds cette semaine. Elle a mis en exergue le comportement inadéquat du chef de protocole de son mari, le président Alpha Condé. Elle aurait alors trouvé l’attitude de sieur Senkou Kaba peu orthodoxe à son égard, car elle demeure avant tout la première dame de la République de Guinée et mérite donc respect et considération.

Cette sortie médiatique de la première dame laisse sous-entendre que son impact est quasi insignifiant et sa présence encombrante.

Une première en Guinée, car les anciennes premières dames guinéennes quoique moins diplômées que madame Djené Kaba, eurent un impact énorme et positif sur la société guinéenne. 

Elles savaient surtout incarner leur rôle et étaient par exemple en période d’instabilité politique ou de crise quelconque beaucoup plus présentes sur le terrain. L’ex première dame Mme Henriette Conté peut être citée à titre d’exemple. Car elle exerçait avec exemplarité son rôle de première dame. 

Mais madame Djené Kaba qui a eu à tenir lors de la campagne présidentielle d’octobre 2020 un discours éthniciste à Kankan, oublie que lorsqu’un régime n’est rien d’autre qu’une assemblée de fraction d’une partie d’une nation qui ne manque de rien, mais pense profiter de son statut pour maintenir une majorité de la population dans une situation indigne, l’heure risque de sonner où même une première dame ne peut être épargnée par le tourbillon des hommes nuisibles qui sont autour de son mari. Et elle sera aussi maintenue dans une situation où elle ne pourra pas détruire le tourbillon qui l’étouffe.

Donc cette situation incommode ou encore indigne vis-à-vis d’une première dame, qu’elle dénonce aujourd’hui, ne devrait pas la surprendre. 

Mieux, elle fait aussi partie du problème de la Guinée et autour d’elle se trouve des hommes nuisibles qui lui font allégeance et considèrent l’État guinéen comme une source de revenus intarissable. 

Ainsi, si des personnes comme Mr Senkou Kaba qui sont selon elle sans éducation adéquate, existent autour du président Alpha Condé, cela ne devrait pas la mettre en colère, puisqu’elle n’a  jusque-là jamais voulu jouer son rôle de première dame . 

À bien analyser, elle n’a jamais voulu comprendre toujours qu’être l’épouse d’un chef d’état, c’est d’abord chercher à mettre en place des mécanismes indépendants et un espace lui permettant d’effectuer des actions à caractère public.

Par ailleurs, une première dame dans un pays comme la Guinée peut donc incarner un vrai leadership pour impacter à travers des actes positifs la société guinéenne. 

Étant dotée de ressources financières ou peut être d’un budget et même du personnel, son rôle de première dame devrait être défini d’abord par la souplesse et l’opportunité d’un côté et par les contraintes d’un autre.  

Sauf qu’ après une décennie comme première dame, le rôle de madame Djené Kaba continue de faire preuve d’ambiguïté. 

Mieux, elle n’a jamais été entièrement disponible pour façonner un job à son image en fonction de ses engagements et de ce qui lui tient vraiment à cœur. 

Et pourtant toutes les ex premières dames guinéennes ont joué un rôle plus ou moins important et de manière plus ou moins régulière, même si elles ne disposaient pas toutes d’un statut juridique de “première dame” et n’avaient pas le même parcours universitaire que madame Djené Kaba. 

Or, elle utilise aujourd’hui  des moyens humains (collaborateurs, garde du corps) et logistiques sans que les guinéens puissent connaître le budget que ceux-ci nécessitent. Le tout au frais de l’État donc du contribuable guinéen. Son rôle reste officieux, mais les dépenses sont là.

Dans ces temps plus modernes, le rôle de la première dame aurait pu pourtant avec madame Djené Kaba prendre de l’ampleur, allant jusqu’à se mobiliser et s’engager pour certaines causes plus ou moins fortes en Guinée. De l’ethnocentrisme politique, les pesanteurs socio-culturelle liées à l’épanouissement de la femme guinéenne, l’éducation de la jeune fille, promotion du leadership féminin etc.. 

Elle aurait pu y mettre du sien à sa manière, en fonction de sa personnalité. 

Apparemment, la première dame guinéenne à l’image de toutes ces personnes regroupées autour du président Alpha Condé n’a aucun intérêt à clarifier son rôle, c’est-à-dire regarder le passé, l’assumer, et le dépasser pour l’intérêt suprême de la nation guinéenne.

Et pourtant le rôle d’une première dame est d’abord national, qu’il s’agisse d’actions culturelles, caritatives, sociales, de lutte contre les inégalités… Ces activités ont une portée symbolique qui compte pour nos concitoyens, et permettent de véhiculer des messages sociétaux d’une réelle importance. 

Enfin, que ce soit en tant qu’épouse ou de son propre chef, elle peut avoir un impact international et diplomatique non négligeable.

Sauf que nous sommes en Guinée, ce pays où tout change pour que rien ne change. 

Aissatou Cherif Baldé 

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