Chômage des jeunes, quel bilan pour le président de la République de Guinée ?

Dix ans après l’élection d’Alpha Condé, le chef de l’État guinéen affiche un bilan mitigé en matière de lutte contre le chômage des jeunes.

Et s’il devrait d’ailleurs être réélu  selon son bilan, dans le respect strict des règles du processus électoral d’un État qui se veut démocratique, il n’aurait certainement jamais eu plus de 20 % des suffrages exprimés. 

Mais comme il s’agit de la Guinée, ce pays où “un opposant historique” a décidé de faire de l’alternance démocratique pacifique lettre morte, tentons de nous intéresser à l’un de ses engagements présidentiels notamment l’emploi des jeunes.

S’agissant des promesses effectuées par le candidat Alpha Condé lors de ses campagnes présidentielles, si certaines ont peut-être d’ores et déjà étaient mises en œuvre avec un bilan très mitigé, d’autres comme l’emploi des jeunes restent encore en bas de l’échelle de réalisation du sieur Alpha Condé. 

Et pourtant la Guinée  de demain, dans la prospérité et la solidarité, passe par une transformation sociale, économique et structurelle qui s’articule autour de l’unité nationale, la démocratie et la bonne gouvernance pour une économie durable et dynamique pouvant créer le plein emploi pour les jeunes. 

Seulement la création de l’emploi pour les jeunes peut redonner espoir à la jeunesse guinéenne, empêcher l’immigration clandestine, la fuite des cerveaux etc… Une 

création qui sera ainsi plus forte pour multiplier ses succès sur l’échiquier des grandes nations et porter plus haut la voix de la Guinée. 

Mais malheureusement l’emploi des jeunes n’a jamais été une préoccupation majeure des dirigeants guinéens. Et leurs échecs dans ce domaine est plus que cuisant.

La crise de l’emploi-jeune s’est amplifiée d’ailleurs ces dix dernières années. Le pouvoir politique actuel a cultivé sans gêne la culture de la dépendance et de la mendicité dans la société guinéenne. Une mentalité qui impacte très sérieusement la construction sociale des jeunes en Guinée.

En effet, la mentalité du travail ou celle du dur labeur a été de nos jours, remplacé par l’esprit de facilité, de mendicité et de l’oisiveté dans la société guinéenne et c’est l’une des raisons pourquoi chacun veut faire de la politique en Guinée, puisque le régime actuel en a fait un métier. Chaque médiocre, chaque fainéant, chaque transhumant politique et déflaté de la diaspora peuvent de surcroît se lancer en politique ou être parachutés dans le gouvernement. Et tout escroc, incompétent flatteur peut avoir un poste ministériel. 

Le gouvernement de Mr Alpha refuse de faire comprendre à la jeunesse guinéenne que l’État guinéen doit impérativement se construire autour de l’idée que «l’identité sociale d’une personne se fait par le travail. Je suis quelqu’un parce que j’ai un métier». Et c’est cette mentalité qui fait entre autres qu’en Allemagne, le taux de chômage des jeunes de (15-24 ans) est le plus bas d’Europe. Il est à 7,1%, près de trois fois inférieur à son équivalent français.

De la formation des jeunes à l’aide accordée aux chômeurs en passant par les emplois dits «atypiques», le système allemand vise à garder les personnes en emploi. Durant leurs études, plus de la moitié des étudiants allemands découvrent par exemple rapidement l’entreprise en effectuant un apprentissage, leur permettant d’être plus attractifs sur le marché du travail. «Les jeunes sont qualifiés, travaillent tôt et sont autonomes ». 

Cela peut paraître irréalisable en Guinée. Or, en faisant allusion à mon expérience et expertise en tant que conseillère à la politique de l’emploi et développement de stratégie de lutte contre le chômage en Allemagne, il est possible de faire enraciner cette mentalité en Guinée. 

Il faut cependant commencer par relever les échecs de nos Gouvernants en matière de politique d’emploi en passant par: 

*l’éducation et la formation tout au long de la vie;

*assurer l’adéquation entre la formation et l’emploi;

*la mise en place d’un dispositif d’appui ciblé à l’auto-emploi en vue de la réduction du sous-emploi et de la migration du secteur informel vers le secteur formel;

*assurer l’égalité dans l’emploi tout en promouvant une discrimination positive. 

Par ailleurs, il faudra impérativement mettre la jeune femme guinéenne au cœur des  priorités de  l’Etat, car celle-ci constitue à elle seule un indicateur de vulnérabilité notamment pour nos concitoyennes vivant dans le monde rural. 

La précarité dans laquelle évolue cette frange de la population est préoccupante au regard des dépenses de prestige qu’engagent impunément nos dirigeants. 

Or, la jeune femme doit être un vecteur de développement en même temps que socle de la famille guinéenne. Toute politique de développement devrait faire de ce segment, un levier essentiel pour combattre et éradiquer la pauvreté et cela sera possible que par:

*le renforcement de son autonomie financière, par la promotion de l’entrepreneuriat féminin dont la finalité sera de favoriser son insertion dans le circuit économique pour en faire un véritable moteur de la croissance ; 

*l’accompagnement et l’encadrement des organisations de femmes en matière de formation ;

*la promotion des structures financières décentralisées et la création d’une Banque des Femmes pour un accès plus facile au financement de leurs activités et projets. 

Alors Mr le Président Alpha Condé, après votre assassinat programmé et brusque de la démocratie guinéenne le 18.10.20, suivi d’un deuil traumatique pour le peuple conscient, il est temps de chercher à inverser la courbe du chômage des jeunes guinéens. 

Car en faisant de la création de l’emploi-jeune votre champ de bataille, vous n’aurez certainement pas besoin de parapher des accords avec les chancelleries occidentales telles que l’Allemagne pour fin de déportation de vos jeunes guinéens qui ont fui la Guinée par manque de perspective et d’avenir prometteur. 

Vous devez Mr. le Président Alpha Condé enfin chercher  à réaliser ne fût- ce qu’en partie cet engagement en passant par une politique efficace en matière emploi pour inverser la courbe du taux d’emploi informel et de sous emplois, qui demeure encore trop fort en Guinée. 

Aissatou Cherif Baldé 

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