Depuis le jeudi 28 juillet 22, la Guinée a replongé dans son cycle de violence habituel où opposition politique et autorités s’accusent mutuellement d’être à la base de la tragédie et l’instabilité politique que vit ce pays depuis bientôt onze ans.
Et pourtant la population guinéenne a cru que l’arrivée de Mamady Doumbouya à la tête de l’Etat guinéen le 05 septembre 2021 (si Etat y’en a), était un signe annonciateur d’un réel changement qui rimait avec un avenir prometteur.
Quelques actes posés au départ par la junte guinéenne tels que la poursuite des criminels financiers, la récupération des biens de l’État, la lutte contre la corruption organisée laissaient entendre que cet énième coup d’État militaire allait devenir un véritable succès.
Mais cet espoir s’estompe peu à peu, laissant place à un désespoir total de la population et surtout la couche juvénile à l’image de celle de la commune urbaine de Ratoma qui se trouve aujourd’hui confrontée à toute sorte de maux (chômage, violence, manque d’éducation) d’une nation sans Etat.
La population guinéenne voit pourtant s’agiter des entrepreneurs et élites politiques, très souvent opportunistes, médiocres, égoïstes alors que sur le terrain, leur vie n’a pas changé.
Elle est de facto devenue l’escalier de tous ces personnages politiques assoiffés de pouvoir sans bagages intellectuels ou aptitudes professionnelles pour atteindre le sommet.
On se sert de la population de l’axe pour pénétrer et monter partout. Ils arrivent par eux aux privilèges, à la notoriété, au pouvoir, à la richesse.
Ces gens ne construisent aucun escalier pour atteindre le sommet. Ils s’y retrouvent par un simple saut. Et c’est pourquoi à la descente, ils se cassent souvent le coup.
En effet, les routes goudronnées, les écoles ou les hôpitaux sont toujours aussi rares dans le pays. Certaines régions de la Guinée vivent en marge de tout progrès.
Pourtant, avec un nombre pléthorique de partis politiques et d’organisations de la société civile pour une population d’environ 12 Millions d’habitants, les dirigeants ne manquent pas.
Mais la Guinée manque pourtant de tout et est gangrenée par la corruption, l’ethnicité, le népotisme, le clientélisme. On y trouve partout des corrompus et corrupteurs, adeptes de la kakistocratie, ce pouvoir des médiocres ainsi « Chacun veut sa part du gâteau ».
Il est donc évident que les ambitions personnelles l’emportent sur le souci d’édifier un État stable, démocratique, progressiste, juste dans la continuité et de répondre aux besoins de la population.
Et dans ce pays fort de plusieurs peuples différents, où l’identité ethnique prime encore sur l’identité nationale, tout incident peut déboucher sur des violences interethniques.
Mais les acteurs du secteur politique, n’y prêtent pas attention. Ils pratiquent la politique du ventre pour instaurer un système de client-patron entre eux et leurs militants, et qui par manque de culture politique, d’identité nationale commune forte et d’éducation, n’a d’autre choix que de suivre une classe politique inefficace, ethniciste et irresponsable.
Une classe politique habituée des compromissions contre nature pour avoir des postes ministériels et des privilèges.
À bien analyser, la Guinée est un pays où l’ordre des choses est fortement perturbé. Un désordre, une image de la décadence que le pays vit, voulu pour désorienter et semer plus de chaos.
De la violence d’État organisée en passant par les tueries des enfants de la commune urbaine de Ratoma, jusqu’à la surdité sociale et politique actuelle de la junte militaire guinéenne, démontrent ici à suffisance que le coup d’État militaire est en train de tourner à l’aigre.
Dans ce contexte, Il est impératif et urgent d’avoir une classe politique efficace et responsable en Guinée, qui rassemble et suppose des individualités intègres et compétentes en la matière et qui refuse de prêcher la haine et la division.
Car il faut comprendre qu’à part quelques nominations aux postes ministériels ou de premiers ministres, les femmes et hommes guinéens engagés, intègres, patriotes n’ont jamais eu l’opportunité de tenir les gouvernails de ce pays.
Mieux, les tenants du pouvoir à l’image de la junte militaire guinéenne ont toujours porté un coup de frein à la démocratisation et à la transformation de ce pays. Ils ont tous encouragé l’effritement de l’État et l’enracinement du néopatrimonialisme.
Un fait qui explique que certains acteurs politiques surtout les jeunes censés pourtant incarner le changement, ne voient aucune perspective d’avenir, puisque le gouvernement guinéen de Conté à Alpha Condé organise des élections qu’elles gagnent.
Alors ces acteurs politiques se rallient facilement au pouvoir pour avoir leur part du gâteau.
C’est pour cela que depuis le coup d’État militaire du 05 septembre 2021, beaucoup de jeunes adeptes de la politique du ventre sont devenus des caisses de résonance du pouvoir militaire dans l’espoir d’obtenir un décret.
La junte militaire guinéenne n’a pas pu résister à ce système criminel pour imposer la rupture.
Elle a aussi fait le choix d’être l’incarnation du pouvoir des pires.
Ainsi de fil à aiguille, la contagion gagne et s’installe dans l’esprit, des guinéens, et est devenue une règle, puisque chaque guinéen est de nos jours devenu politicien, comme s’il s’agissait d’un métier. Ainsi, s’ensuit l’impunité qui favorise la corruption.
Les gouvernants en Guinée deviennent alors des corrupteurs et des corrompus à la fois. Tel est le cas aujourd’hui en Guinée.
Quelle leçon et message du civisme, de moralité, d’éthique et d’intégrité venant au plus haut sommet de l’État qui n’hésite pas à soudoyer à coup de millions de francs guinéens des jeunes acteurs politiques pour parvenir à ses fins !
Et après on s’étonne de la propagation de l’incivisme.
Pour éviter que l’anarchie ne s’installe en Guinée, pour sauver ce pays de ses propres démons.
On doit impérativement avoir des hommes et femmes politiques audacieux, sincères, patriotes, anti-impérialistes et engagés avec conviction et principes.
Car on ne peut pas se passer d’une classe politique quelque soit la dégradation économique et sociale du pays et quelque soit le témoignage négatif qu’ont laissé certains responsables politiques.
Favoriser donc l’alternance de nature à donner une bouffée d’oxygène à la classe politique en friche, avec une autre manière de faire de la politique, reste incontournable.
Le Renouveau sur fond d’une alternance mentale, reste alors une solution crédible pour redorer son blason et renouer confiance avec le peuple.
Il est vrai que je suis de ceux qui jettent toujours des pierres à la classe politique, tout parti confondu.
Mais ma démarche s’inscrit dans une pensée positive pour la refondation et le renouveau de la classe politique guinéenne et travailler au renouvellement des ressources humaines.
« Faire de la politique c’est faire le choix de servir son pays et non se servir de son pays pour des raisons égotiques et égoïstes. C’est un engagement dans un esprit de responsabilité. Un pays ne peut pas se passer de la classe politique. Ce n’est pas une question d’hommes, d’époque ou d’appartenance régionale, ethnique ou socio culturelle, mais un principe habité dans un état d’esprit de service et de responsabilité »
Aïssatou Chérif Baldé