Guinée: Lamine Guirassy se demande si l’État serait en train de devenir la Birmanie. 

Lamine Guirassy, journaliste et patron du groupe Hadafo Média, désormais ancien proche de la junte militaire guinéenne était hier vendredi 26 janvier 2024 l’invité du média français Radio France internationale (RFI) dans son émission « Le Grand Invité Afrique ». 

C’est un Lamine Guirassy préoccupé par la situation que traverse le pays qui s’est exprimé ce vendredi sur les antennes de Radio France Internationale (RFI). 

Au micro de RFI, le patron du groupe Hadafo Média a dénoncé sans langue de bois les restrictions imposées aux médias suivis de brouillage des fréquences de radios et le retrait de chaînes privées sur les bouquets Canal+ et Star Times.

Et il affirme pendant son intervention sur RFI ceci: « depuis novembre 2023, l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPT) a  décidé de brouiller notre fréquence sans raison. On n’a pas reçu de communiqué ni de lettre par rapport à cette situation. Hadafo Médias est en règle avec l’ARPT. On ne doit aucune facture à l’ARPT. On lui a écrit pour comprendre ce qui se passe. On a écrit à la Haute autorité de communication et à la présidence de la République. On n’a jamais eu de retour » .

« Mais on sait exactement que c’est l’ARPT qui bloquait, qui brouille notre fréquence, notamment la fréquence de notre radio Espace Guinée, et ceci à des heures très précises, c’est-à-dire à l’heure de notre émission de débats Les Grandes gueules. Entre 9h00 et 12h00, ils brouillaient complètement la fréquence. Après, ils se sont rabattus aussi sur Sweet FM -sur Sweet FM – parce que l’émission y est rediffusée -, notre deuxième radio, à 18h. Bizarrement, à 18h, la fréquence de Sweet FM aussi est brouillée» a t-il renchérit au micro de RFI. 

Il poursuit son intervention en ces termes « si rien n’est fait pour mettre fin au brouillage de la fréquence de sa radio, Lamine Guirassy n’écarte pas l’option de mettre son personnel en congé technique» 

Car selon le patron du groupe Hadafo Média “Avec la situation qui prévaut, il va falloir prendre des dispositions. Depuis décembre, vu que l’audimat baisse, quand on voit les pertes, c’est des milliards de francs guinéens. Cela a des répercussions sur les salariés. Si la situation ne s’arrange pas, nous serons obligés de faire comme d’autres médias et avoir le service minimum” 

Il poursuit que  « derrière les agissements des autorités, se cache la volonté de “mettre off tous les médias et toutes les voies dissonantes. Depuis plus de deux mois, on n’a pas de connexion. Les gens ont peur. Quand est-ce que cette situation va s’arrêter ? Personne ne peut le dire. C’est un climat de désolation(…). On ne comprend pas. Le sauveur est devenu carrément l’oppresseur ».

À la question de savoir s’il n’est plus maître de son fréquence, il répond sur RFI à l’affirmatif:

 «Oui, de la musique pour rendre hommage à l’armée guinéenne, appelant à soutenir l’armée et combattre les traîtres de la Guinée. C’est une chanson du Bembeya Jazz National que Demba Camara a chanté dans les années 70 pour faire allusion à l’agression portugaise du 22 novembre 1970 en Guinée. Elle passe en boucle sur la fréquence» 

Il s’agit selon lui des messages de propagandes similaire au régime sanguinaire du premier président Ahmed Sékou Touré.

Et aussi à la question de savoir en quoi la situation actuelle est différente des autres, il répond que les médias privés guinéens n’ont jamais vécu une telle situation.

 « Nous n’avons jamais vu ça quand on parle de transition. Nous, c’est la deuxième fois qu’on assiste à une transition militaire, après Konaté et après Dadis. Au temps d’Alpha Condé, on a tellement dénoncé, on a tellement critiqué, mais jamais Alpha Condé n’est allé à ce point-là, à demander aux opérateurs d’occulter des chaînes ou à brouiller lesles fréquences. Jamais il ne l’a fait. Est-ce que notre État est en train de devenir la Birmanie ? Je n’en sais rien du tout, mais je me pose des questions, parce que la chape de plomb, c’est juste extraordinaire. C’est-à-dire que vous travaillez, mais vous rentrez à la maison, et vous vous dites peut-être que ce qu’il reste, c’est l’élimination physique. Ce qui est en train de se passer est inédit, c’est tellement grave que c’est juste incroyable» a-t-il lâché . 

La fragilité du pouvoir militaire ne fait plus de doute 

Il faut noter que la fragilité du pouvoir militaire en Guinée ne fait plus de doute. Elle est devenue palpable depuis l’évasion du Colonel Claude Pivi de la maison d’arrêt de Coronthie au mois de novembre 2023. 

La junte intensifie depuis l’évasion de Claude Pivi, la censure des médias, la restriction d’internet et les réseaux sociaux. 

L’arrestation la semaine dernière du secrétaire général du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée M Pendessa pour avoir appelé à manifester, illustre la fragilité du pouvoir militaire. 

Le pays évolue aujourd’hui entre suspicions, arrestations, intimidations, censure, harcèlement, propagande et démagogie populiste. 

Et il n’est plus question de la réussite de la transition politique enclenchée le 05 septembre 2021.

Le libérateur devenu oppresseur, mégalomane, corrompu et corrupteur qui vit dans un luxe ostentatoire veut à tout prix enterrer la transition politique pour se pérenniser au pouvoir. 

On se demande tout de même qu’est ce qui a pu provoquer cette rupture étonnante entre Guirassy et la junte militaire guinéenne qui vivait une relation idyllique et dont les journalistes montaient souvent au créneau pour défendre les putschistes? 

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