Guinée: Suspension des partis par la junte, un autre coup de massue administré à la démocratie. 

La junte guinéenne, qui dirige le pays avec excès a suspendu ce vendredi 14 mars 2025, pour trois mois deux des principaux partis politiques du pays que sont notamment le parti de l’ancien Président Alpha Condé (RPG-arc-en-ciel) et le parti de Sidya Touré (UFR), l’ancien Premier ministre du président Conté. 

Elle a dissout 27 autres formations politiques quelques jours après avoir affirmé vouloir organiser des élections cette année.

Une annonce qui a pourtant été rejetée à maintes reprises par le ministre porte-parole Ousmane Gaoual Diallo. 

Quant au Parti de l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo, figure de l’opposition guinéenne en exil. Il a été autorisé à poursuivre ses activités, mais sous réserve d’organiser un congrès au cours des 45 prochaine jours.

Une décision très ambiguë du ministre de la Décentralisation et de l’administration du territoire, M Ibrahima Kalil Condé. 

Car il existe une décision de justice interdisant la formation politique de Cellou Dalein Diallo d’organiser son congrès. Et cette décision a été motivée par le fait que L’UFDG ait exclu Ousmane Gaoual Diallo, ancien membre du bureau politique nationale de L’UFDG. 

Alors comment peut-on donc lui ordonner d’organiser son congrès en 45 jours?

L’autre fait marquant est de savoir, comment peut-on procéder à la suspension de l’UFR et du RPG-arc-en-ciel à cause de leur finance du moment où il n’existe aucun texte de loi réglementant ou encadrant la question de fonds des partis politiques en Guinée? 

Et la junte guinéenne devrait selon la charte de la transition et l’accord signé entre elle et la Cédéao fixant la fin de la transition en décembre 2024,  quitter donc le pouvoir le 31 décembre 2024. 

Ce délai n’ayant pas été respecté par la junte est par conséquent depuis le 01 janvier 2025 illégale et illégitime. 

Il n’existe donc aucune loi qui lui confère le pouvoir de suspension et de dissolution des partis politiques.

Elle ne peut pas donc disposer du pouvoir et les moyens légaux pour suspendre, dissoudre un parti politique en Guinée. 

C’est une décision adoptée par un clan facho-ethniciste, dont le but recherché est l’étranglement des partis politiques établis et surtout celui de Cellou Dalein Diallo. 

La non suspension de L’UFDG est juste une manière de couper la poire en deux pour émietter davantage l’opposition et affaiblir leur union sacrée actuelle 

Il faut noter que cette annonce intervient dans un climat tendu et marqué surtout par la disparition de plusieurs opposants à la junte et une restriction sévère des libertés individuelles et fondamentales. 

C’est un autre coup de massue administré  à la démocratie guinéenne

Et c’est surtout un recul démocratique grave pour le pays qui depuis l’avènement du multipartisme en 1990 n’a jamais connu une telle situation. 

Car si nous sommes unanimes qu’il faut encourager l’alternance au sein des partis politiques dans le respect des règles de jeux démocratiques, en organisant des congrès pour le renouvellement des élus au sein des partis politiques par exemple et rendre les méthodes de financement transparentes. 

Ces méthodes de gestion de la problématique des partis politiques par la junte militaire guinéenne entravent la consolidation de la démocratie en Guinée. 

Dans ce contexte, la  démocratie, qui est à l’origine associée à de grands espoirs d’autodétermination politique et de sauvegarde de la paix intérieure, n’est plus qu’une coquille formelle dans la structure réelle de la société guinéenne. 

Elle continuera d’être réduite à un spectacle, une mise en scène d’élections périodiques, où la population peut choisir parmi les candidats choisis par le régime un « spectre d’élite » donné. 

La junte cherche tout simplement à remplacer la démocratie réelle par l’illusion de la démocratie comme dans la plupart des pays africains; où le débat public libre est remplacé par la gestion des opinions et de l’indignation. Le principe directeur du citoyen responsable est aussi remplacé par l’idéal néopatrimonial. 

Et si nous voulons avoir un système démocratique consolidé, l’instauration d’un système de parti politique institutionnalisé demeure alors impérative. 

Car institutionnaliser les partis politiques est le seul moyen de faire d’eux des organisations durables, ancrées dans la société, légitimes, stables et efficaces sur le terrain, susceptibles de contribuer de façon positive à la consolidation démocratique. 

Mais ces décisions du ministre Ibrahima Kalil Condé révèlent juste l’hostilité du pouvoir militaire à la démocratie. 

Il reste à savoir si les partis politiques vont ensemble monter au créneau pour dénoncer de façon harmonieuse cette décision qui freine les acquis démocratiques et le multipartisme obtenu des mains de feu président Lansana Conté. 

Aïssatou Chérif Baldé

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