Le Tchad a mis hier jeudi 28 novembre 2024 un terme à l’accord colonial en matière de défense avec l’État français.
Le Tchad vient donc suivre le pas de ses voisins, de la zone sahélienne en Afrique de l’ouest notamment (le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Pourtant le Tchad était jusque-là le seul pays de la zone sahélienne à maintenir cet accord de défense colonial avec la France.
C’est un événement plus que historique pour le peuple tchadien et l’Afrique des libertés.
Une annonce surprenante du gouvernement tchadien
Sur la page Facebook du gouvernement de la République du Tchad on pouvait lire la déclaration suivante du ministre des affaires étrangères, Abderaman Koulamallah :« Le gouvernement de la République du Tchad informe l’opinion nationale et internationale de sa décision de mettre fin à l’accord de coopération en matière de défense signé avec la République française».
Il a souligné aussi que « La France est un partenaire essentiel mais elle doit aussi considérer désormais que le Tchad a grandi, a mûri et que le Tchad est un État souverain et très jaloux de sa souveraineté ».
Une nouvelle sans doute très surprenante pour les africains las du du joug du néocolonialisme français, du paternalisme français et de la françafrique et surtout aussi pour les adeptes de la françafrique.
Car le Tchad a toujours été le maillon fort de l’impérialisme mélanophobe français.
Et c’est pourquoi après l’assassinat du père Deby, la France ne s’est pas gênée d’apporter son soutien au fils Deby pour continuer à perpétuer la françafrique dans toute sa laideur.
De toute évidence, les autorités françaises et leurs alliés ne se gênent jamais de se montrer plus ambiguës avec les autorités militaires et les gouvernements despotiques qui servent leurs intérêts sur le continent.
Et c’est pourquoi au Tchad, ils ont soutenu un coup d’État militaire imposant aux tchadiens un État despotique tout en enterrant la constitution.
Or il était prévu par la constitution, que la présidence intérimaire soit assurée par le président de l’Assemblée nationale.
Mieux, la violation aggravante de la constitution n’a pas dérangé le président français Emmanuel Macron pourtant prompt à discréditer, dénigrer les auteurs du coup d’État militaire malien et la jeunesse panafricaniste actifs sur les réseaux sociaux, en les qualifiant d’être des manipulés de la Russie, ou de la Turquie.
Car pour Macron, il existe selon sa logique de mauvais coups d’Etat et de bons coups d’Etat.
Celui du Mali serait donc un mauvais coup d’État militaire, tandis que celui de la Guinée et du Tchad peuvent être qualifiés de bons coups d’État militaires.
Une vision néo-impériale qui sous-entend que les peuples africains ne méritent pas la démocratie.
Il faut leur imposer des hommes et femmes soumis qui vont perpétuer la domination du maître. Les acteurs étatiques doivent forcément devenir l’allié, « la voix du maître » blanc, et participer ainsi à la fragilisation des régimes politiques que le maître met à mal depuis l’indépendance par des coups d’états, des assassinats de leaders.
Sauf que la génération actuelle de dirigeant africain est lasse de ce paternalisme
Si la France peut compter sur le nouveau pion de la françafrique Mamadi Doumbouya et sur les anciens pions de la Côte d’Ivoire et peut-être du Gabon et du Congo-Brazzaville, Togo, Sénégal pour perpétuer sa politique françafricaine.
Et ce n’est plus le cas désormais pour la grande majorité des dirigeants africains actuels dans les anciennes colonies françaises.
Ces présidents acculés par une jeunesse africaine assoiffée de liberté, avec un fou désir d’avoir puissance de son destin pour mettre fin à l’emprise spectrale de l’ancien maître, qui ne veut pas l’être, ne veulent plus être ce personnel local du système-monde au service du système criminel françafrique.
Car ils savent que la présence de l’armée française dans certaines de ses ex colonies en Afrique, l’un de ses vestiges coloniaux est de plus en plus dénoncée par la jeunesse africaine et surtout par les panafricanistes.
Le Sénégal souhaite le départ de l’armée française
Et Bassirou Diomaye Faye, l’actuel président sénégalais a annoncé lors d’une interview accordée hier jeudi quelques heures avant l’annonce du gouvernement tchadien au journal français le monde que son souhait était de faire partir les 350 militaires français du sol sénégalais.
Le président Faye a estimé que cette présence ne correspond pas à la vision sénégalaise de la souveraineté et de l’indépendance.
Il s’interroge d’ailleurs sur la nécessité de maintenir des bases étrangères dans un pays qui aspire à une pleine autonomie.
Et il a souligné le fait que le Sénégal entretient aussi des partenariats stratégiques avec des puissances comme les États-Unis, la Chine ou encore la Turquie, mais sans pour autant accueillir des forces militaires de ces pays sur son territoire.
Pour lui, cette coopération prouve qu’il est possible d’agir autrement et de sortir d’un modèle hérité de l’histoire coloniale.
Pour l’heure, il n’a fixé aucun calendrier pour ce retrait, évoquant une transition à venir.
Malgré cette prise de position, Bassirou Diomaye Faye a tenu à rassurer sur la qualité des relations bilatérales avec la France, affirmant qu’elles restent solides.
Cette déclaration intervient dans un contexte où la présence française en Afrique est de plus en plus contestée, alors que d’autres puissances, comme la Russie, renforcent leur influence sur le continent.
Une défaite géopolitique pour la France
Cette décision historique de l’État tchadien de cesser toute coopération militaire avec la France est une défaite géopolitique pour la diplomatie française et dans un contexte de grandes incertitudes mondiales.
Et c’est pourquoi l’actuel ministre français des affaires étrangères a tenté le tout pour le tout pour convaincre N’Djamena de renoncer à cette rupture, mais en vain.
Car le président tchadien, considéré jusqu’ici comme un pion de la françafrique a refroidi les ambitions de l’État français qui ne veut pas abandonner son rôle du maître néocolonialiste.
Mais pour le jeune président Mahamat Deby Itno « Après 66 ans de la proclamation de la République du Tchad, il est temps pour le Tchad d’affirmer sa souveraineté pleine et entière, et de redéfinir ses partenariats stratégiques selon les priorités nationales ».
Dans le communiqué du gouvernement tchadien, on affirme que cette décision marque un tournant historique et a été prise après une analyse approfondie.
« Le Tchad (…) s’engage à respecter les modalités prévues pour sa résiliation, y compris le délai de préavis, et à collaborer avec les autorités françaises afin d’assurer une transition harmonieuse », lit-on encore dans le communiqué.
Espérons tout de même que cette rupture ne poussera pas Macron à porter ses gants de Boxe néocolonialistes, comme il l’a fait avec le Niger, le Burkina Faso et le Mali.
Aïssatou Chérif Baldé