Pourquoi la recrudescence des coups d’Etat militaires dans les pays francophones d’Afriques?

 

Un coup d’État est toujours une rupture, un recul démocratique,  car il remet en cause les fondements de la République tels qu’ils avaient été institués  par la volonté du peuple.

Le coup d’état est donc toujours en principe  hors norme.

Mais il  a été  constaté  que des coups d’État peuvent être salvateurs dans une certaine mesure:Rawlings, Sankara, même  si on ne peut pas faire comme si tout a été parfait avec  eux. Et même si le principe demeure que le domicile naturel des militaires s’est avéré être les casernes et la sauvegarde des frontières. 

Il faut savoir que dans bien des cas,l’intervention des militaires est la conséquence des dysfonctionnements constatés au niveau de la gouvernance civile.

Qu’est ce qui explique la recrudescence des coups d’Etat militaires? 

La récurrence des coups d’État militaires en Afrique de l’ouest pourrait s’expliquer certainement par le fait que ceux qui ont accédé au pouvoir par les urnes ont tendance à  croire que  rien ne pourra plus leur résister. 

Alors que leur accession est pour la plupart le résultat  d’urnes truquées ou tronquées qui fatalement appellent à  diverses formes de résistance (soulèvements populaires,insurrections,coup d’etat).

Cette recrudescence apparaît comme le fruit d’un mécontentement profond et récurrent face à des États africains dysfonctionnels, corrompus, mafieux et incapables. 

Ce sont des États qui ont en leur tête des préfet-sidents soumis sur fond d’un pacte colonial aux injonctions de l’État français. Ils sont pour la plupart incapables de relever la multitude de défis auxquels sont confrontés les pays africains que sont le chômage, système de santé défaillant, éducation nationale émiettée, perte de revenu, immigration mortelle. 

Ces présidents africains une fois au pouvoir ne veulent plus être à l’écoute du peuple. 

Ce sont plutôt de de brave petit soldat d’un ordre mondial se vautrant dans la rapine et le crime de masse, vivant de la spoliation des peuples, au nom des droits de l’homme, de la démocratie et du progrès humain, sur fond d’une vision néo-impériale française. 

Nous avons aussi la problématique des putschs constitutionnels qui favorisent la recrudescence des coups d’Etat militaires à répétition. Car lorsque la Constitution fait l’objet de révisions fréquentes,elle finit par perdre  sa sacralité et devient une norme ordinaire qui n’a pas la même transcendance. 

Donc les  citoyens n’y croient plus parce qu’il s’agit en réalité d’une forme de coup d’état constitutionnel. 

Il suffit de jeter un regard dans plusieurs pays africains pour se rendre compte que cette façon d’agir est presque souvent motivée par la volonté de se maintenir de façon  indue au pouvoir,même si la tendance nouvelle est de solliciter un habillage référendaire qui constitue un simple paravent pour se couvrir d’une fausse légitimité que les populations ont du mal à admettre. Tel fut d’ailleurs le cas en Guinée. 

L’autre cause de la recrudescence des coups d’Etat militaires en Afrique de l’ouest est aussi le fait que les acteurs étatiques de cette zone ont toujours réduit la démocratie aux élections et sans aucune possibilité d’une alternance démocratique. 

Or la démocratie c’est aussi savoir convaincre par ses résultats en termes de sécurité, de santé, d’éducation, de bien être et de progrès social. 

Certes la démocratie est souvent analysée sous l’angle de l’élection, d’où l’ex­pression « démocratie électorale ». Et l’organisation d’élections est un critère d’évaluation de la vitalité démocratique d’un pays. 

Cepen­dant, réduire la démocratie à l’organisation d’élections – aussi libres et trans­parentes soient-elles – revient à vider cette notion de tout son sens. D’où la pertinence de penser la démocratie au-delà des élections. En facilitant l’enracinement d’une démocratie consolidée et irréversible. 

Que faire pour mettre fin à ces putschs militaires?

Il faut une conscience citoyenne partagée pour pouvoir escompter des résultats plus ou moins positifs.

La CÉDÉAO doit impérativement arrêter d’être en profond décalage avec le vécu des populations africaines. Car il est  peut être temps de donner un nouveau à  ces différents organes  communautaires qui ne semblent pas avoir pris  conscience  des  enjeux contemporains de la démocratie  et des exigences citoyennes. 

La Cédéao apparaît dans les crises africaines sous le visage du médecin après la mort; elle réagit tardivement alors qu’elle aurait pu ( devrait) le faire en amont. Elle a été majestueusement amorphe lorsque Alpha Condé ,comme d’autres de ses pairs avant lui,modifiait outrancièrement à son seul et exclusif profit la Constitution. 

Enfin, tant que nos dirigeants  continueront  à se comporter comme des suzerains, il ne faudra pas être surpris par les  coups d’État. 

Et tant que ceux qui sont chargés de la transition eux mêmes tombent dans ces travers comme c’est le cas en Guinée, les États africains connaîtront des coups d’État militaires. 

Aïssatou Chérif Baldé 

2 commentaires

  1. Bravo Mme Aissatou Chérif Baldé , sociologue, journaliste émérite. Vos écrits me comblent de savoir et de joie. Toute personne qui parcourt vos lignes sera combler de cultures generales.

  2. Quand l’élite politique échoue dans un pays,les militaires ou les acteurs sociaux auront forcément le culot de s’emparer du pouvoir.Et c’est le cas généralement en Afrique, la vie politique est gérée autrement par des affairistes à relan communautaire, régionaliste et impérialiste.Une fois aux affaires,au lieu qu’ils s’attellent à l’essentiel pour le bien être de leurs peuples, ils se mettent à suisser les peuples au profit des grandes puissances impérialistes.C’est ce qui pousse en grande partie aux militaires de s’intervenir et malheureusement eux aussi une fois parvenus ils font pire que leurs prédécesseurs.

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