Guinée: Un référendum constitutionnel ou le triomphe d’un fiasco collectif du gouvernement de transition.(Par Aissatou Cherif Baldé-Diallo).

Quatre ans après le coup d’État militaire ayant conduit à la prise du pouvoir de l’actuel président de la transition Mamadi Doumbouya, le référendum constitutionnel sur fond d’une campagne référendaire qui a paralysé l’administration publique et fait saigner les caisses de l’État, a eu lieu aujourd’hui 21 septembre 2025 en Guinée. 

On nous parle d’un taux de participation au référendum inférieur à 40%, sur toute l’étendue du territoire sur fond de ratissage des opposants, de coupure d’internet, de la fermeture de l’espace aérien.

Au sein de la diaspora guinéenne de l’Europe, le taux de participation était aussi en dessous des 40 %, sans oublier que beaucoup de Guinéens de l’étranger n’ont pas pu voter puisqu’ils n’ont pas reçu leur carte électorale.

Un résultat prévisible, car ce référendum a été sorti de son contexte, et n’a pas permis de faire comprendre aux électeurs qu’il s’agit de faire le choix entre deux bulletins, « Oui » et « Non”. 

Une constitution unilatérale, sur fond d’exclusion

On nous a soumis une Constitution rédigée sur fond d’exclusion des partis politiques de l’opposition, de la société civile, bref une grande partie de la classe politique qui n’est pas dans l’esprit de la junte.

Ils l’ont rédigé de façon unilatérale tout en faisant appel à des techniciens du droit constitutionnel, dont l’objectif est de les aider à instrumentaliser la constitution voire même réinventer le rôle du droit constitutionnel tout en occultant  les conséquences politologiques d’un tel agissement sur le processus de démocratisation en Guinée. .

Pour rappel, le droit constitutionnel apporte une approche surtout positiviste en s’intéressant au droit tel qu’il est formulé, tandis que les sciences politiques apportent une approche plus sociologique et politique.

Tout bon juriste doit cependant avoir la maîtrise de ces approches pour mesurer l’ampleur des dégâts d’une velléité révisionniste, de l’élaboration d’une constitution sans garantie de protection, d’un référendum mal organisé ou contesté, sur le plan sociologique, politique, administratif dans un État qui peine à consolider sa transition démocratique. 

Et c’est pourquoi il est primordial pour tout bon juriste conscient de connaître l’effet du droit qu’il interprète sur la société. 

La junte a préféré un référendum constitutionnel mal organisé 

La junte fidèle à sa démarche unilatérale, a fait le choix d’utiliser le droit constitutionnel pour légitimer l’idée d’un référendum mal organisé, avec une très faible participation historique dans l’espoir d’obtenir un plébiscite qui dénature le rôle de la Constitution et du référendum constitutionnel dans le processus de démocratisation. 

Cette approche est une fausse bonne idée dans la mesure où en général , le référendum est toujours mêlé, d’une part de plébiscite ou -au contraire- de rejet de la personne qui pose la question. 

C’est ce côté mêlé d’une part de plébiscite ou du rejet de la personne même de Mamadi Doumbouya qu’on a découvert lors de la campagne référendaire mais aussi et surtout à travers le vote d’aujourd’hui.

Mais c’est difficile de vérifier ces faits sur le terrain, car les élections ne sont jamais libres et transparentes et le parti au pouvoir n’organise des élections que lorsqu’il a la certitude de les gagner. 

Un taux de participation au référendum inférieur à 40 % qui confirme le rejet de la constitution taillée sur mesure de la junte 

Selon la déclaration de l’organisation de la société civile guinéenne  «Regard Citoyen», déployée sur le terrain en tant que observatrice et dont nous détenons une copie, le taux de participation au référendum d’aujourd’hui était inférieur à 40% sur toute l’étendue du territoire. Ce résultat prouve à suffisance que ce taux de participation n’est qu’une confirmation du rejet de la personne de Mamadi Doumbouya qui a organisé ce référendum. 

Ce taux de participation est aussi les conséquences du renforcement de la personnalisation du pouvoir de Mamadi Doumbouya. 

On comprend aussi par là qu’on ne refait pas la démocratie par référendum, le référendum abîme la démocratie et c’est pourquoi en Afrique, il demeure l’œuvre des dictateurs et régimes autoritaires à la recherche d’une légitimité dans un peuple qu’ils inventent et dont ils font leurs choses. 

Les dictateurs africains comme Mamady Doumbouya veulent tirer leur légitimité du suffrage universel pour étouffer les corps intermédiaires, pour incarner ce dit peuple, pour enfin étouffer la citoyenneté.

C’est pour toutes ces raisons que la junte militaire guinéenne a soumis sa constitution taillée sur mesure par référendum au peuple de Guinée, afin d’exécuter son plan de confiscation du pouvoir. 

Comme pour dire qu’une transition n’a nullement besoin de prendre une allure de mandat présidentiel pour réussir.

Un parjure bien présent

Mamadi Doumbouya, le putschiste guinéen m a en plus d’avoir le désavantage d’apparaître comme un homme sans honneur; ce qui pour un militaire est un exécrable reniement.

Car quatre ans après le coup d’État, le monarque machiavélien essaie d’opérer  par un artifice éculé de contourner l’interdiction souverainement assumée. 

Car selon Mamady Doumbouya, il ya semble t-il une différence majeure entre déclarer sa candidature et laisser les » autres » le faire, eux qui ne sont pas acteurs mais simples électeurs. Ils n’ont pas à  se dédire,car ils n’avaient rien dit et rien promis. 

Pourtant le parjure est bien présent; il s’est accompli par simple représentation.

En effet en droit, l’acte du représentant produit effet sur la tête du représenté ,donc c’est le Gl Mamady Doumbouya qui en réalise parjure. 

Or le parjure est à la limite un acte de Haute Trahison redevable de la Cour de justice compétente pour les Présidents ou pour qui se déclarent tels. 

Mais Mamady Doumbouya n’a que faire des honneurs, des promesses, ou encore le respect de la parole donnée. 

La transition politique qui a débuté un 5 septembre 2021 a échoué et son référendum, qui devait être un plébiscite, s’est transformé en un désaveu, un fiasco, un rejet d’une personne désavouée par le peuple. ‘

Aïssatou Chérif Baldé 

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